Le GRIM et l'Embobineuse présentent dans le cadre du festival du film C.H.I.A.N.T : GHÉDALIA TAZARTÈS plays "HÄXAN"
Le film est à la fois un film didactique et onirique : la première partie du film est un documentaire historique sur la sorcellerie à travers les âges, avec de nombreux encarts explicatifs. La fin du film tente une explication psychanalityque (en 1922!) des sorcières et de leurs inquisiteurs. Pour illustrer ses thèses, le réalisateur recrée tout le long du film des scènes de sorcellerie d'une beauté et d'une poésie époustoufflantes.
Ghédalia Tazartès est un artiste inclassable et intransigeant. Les apparitions publiques de ce musicien constituent toujours des moments uniques Né à Paris en 1947, Ghédalia Tazartès commence à chanter à l’âge de 12 ans après la mort de sa grand-mère, au cours de promenades solitaires dans le bois de Vincennes. Il publie un premier disque en 1979, Diasporas. Depuis, il a sorti une dizaine d’albums et composé de nombreuses musiques pour la danse, le théâtre et le cinéma.
Á ses débuts, il désigne ses créations par le terme « Impromuz » : s’agissant plutôt pour lui de dessin ou d’écriture sur bande magnétique que de composition musicale, il fallait trouver un terme approprié. Il s’intéresse particulièrement, dans ses compositions, à l’utilisation des possibilités vocales : chez lui, le ton du langage est souvent bien plus important que le sens des mots. Et ce travail vocal s’approprie les sons les plus divers : complaintes des rues, récits de griots africains, chants de muezzin, plaintes yiddish… Ainsi, montages sonores et travail vocal font évoluer l’auditeur dans un univers mystérieux, un monde qu’il invente en s’inspirant des différentes traditions qui traversent la musique.
Depuis quelques années, Ghédalia s'est enfin décidé à remonter sur scène, tout d'abord accompagné (Les Reines d'Angleterre, David Fenech et Jac Berrocal, Norscq et Black Sifichi, Nicolas Lelièvre) et à présent en solo (même si parfois son très jeune fils monte lui aussi sur scène !).
Il a joué depuis 2009 à Riga (Festival Skanu Mezs/Sound Forest), Bruxelles, Rotterdam, Dijon (Festival Why Note), Marseille, Lyon, Varsovie, Jerusalem (Festival Musraramix), Tel Aviv, Le Thor (Festival gare Aux Oreilles), Madrid (Festival Experimental Club).
En 2008, il a été invité à se produire lors des concerts autour de l'exposition de Patti Smith à la Fondation Cartier à Paris.
PRESSE :
"Un orchestre à lui tout seul (sa voix se transforme en voix d’enfant , de femme, de viellard, de chamane). Il assemble des éléments sonores de différentes natures. De la musique jouée avec de vrais instruments, par lui et, le cas échéant, des invités. De vraies chansons traditionnelles. De la poésie savante ou populaire. Différentes langues minoritaires ou majoritaires, utilisées pour leur place symbolique dans le grand jeu de la domination culturelle. Une langue inventée par lui, aussi, spécialement pour chanter, et cristallisant ce que toutes les langues oublient de dire. Et il replace ces créations sonores de l’homme dans leur contexte bruyant signifiant, dans le grand bruissement de l’univers des choses. Des sons témoignages, des sons d’atmosphères, des prélèvements dans l’environnement social et naturel. Mais il ne les transforme pas en «autre chose» comme il est banal de le faire aujourd’hui avec les nouvelles machines. Non, il conserve leur identité d’origine et en renforce la signification. Ce qui l’intéresse est bien ce qu’ont à dire ces objets sonores du monde qui nous entoure, monde matériel et immatériel, monde de l’échange marchand et non-marchand. Il les rend plus bavards, il les fait parler en les plongeant dans des agencements qui leur sont étrangers. Il coupe et monte des images sonores selon les techniques utilisées au cinéma et cette technique fait ressortir leur sens.” (Pierre Hemptine).
"Ghedalia Tazartes navigue entre des racines profondément juives et une culture de l’avant-garde européenne. Disciple turbulent de Pierre Schaeffer ou Pierre Henry, il a commencé par le collage de bandes sonores, des morceaux instrumentaux abstraits, pour s’orienter vers un travail profondément vocal, inspiré de traditions ethniques. Sa voix au genre indéfinissable navigue entre envoutement et terreur. Une performance entre poésie sonore et chant hassidique trop rare par chez nous. N’hésitez pas à vous procurer aussi ses magnifiques albums sur le label Demosaurus !" (Ateliers Claus)
On peut rapprocher parfois son travail de la musique concrète pour sa manipulation des bandes Revox et le collage des sons, alors même qu’il dit n’avoir découvert que postérieurement le travail de Pierre Schaeffer et de Pierre Henry. Ce qui l’intéresse est bien ce qu’ont à dire ces objets sonores du monde qui nous entoure, monde matériel et immatériel, monde de l’échange marchand et non-marchand. Il les rend plus bavards, il les fait parler en les plongeant dans des agen- cements qui leur sont étrangers. Il coupe et monte des images sonores selon les techniques utilisées au cinéma et cette technique fait ressortir leur sens. Ce sont de véritables films sonores laissant beaucoup plus de place à l’interprétation parce que le son est moins prescripteur que l’image. On songe aussi à la poésie sonore pour l’importance accordée à la déclamation, à la voix, au texte. Ghédalia Tazartès fait de la musique sans se considérer musicien. Il se pense en artisan qui travaille des matières sonores. Bricoleur, autodidacte, poète du son, il invente ses propres techniques, son savoir-faire.
HAXAN (LA SORCELLERIE A TRAVERS LES AGES) (1921)
De la nuit des temps jusqu’aux années 20 (l’actualité donc pour l’époque du film), "Haxan" survole le monde de la sorcellerie, entre sabbats, tortures, pratiques magiques, possession…
Après "Le cabinet du docteur Caligari", le cinéma fantastique germanique prendra un chemin bien connu des cinéphiles, en grande partie consacré au fameux "Nosferatu" et à "Faust", tous deux de Murnau. Classique du septième art lui aussi, "Haxan" défie le cinéma de l’époque et se tient comme une œuvre unique. Débutant comme chanteur d’opéra (sic!), Benjamin Christensen abandonne la musique pour le cinéma, avec "Haxan" et quelques autres œuvres fortement gothiques, à présent un peu oubliées. Avant "Le chien andalou", "Haxan" fut déjà sujet à une contreverse importante, dûe évidemment à son coté anti-clérical et ses images chocs.
Sept parties forment le film, la première étant surtout proche du documentaire. Car à sa base, "Haxan" est un film documentaire consacré à la sorcellerie. Le premier segment ne montre presque aucune scène filmée, et s’appuie sur des gravures (décortiquées ainsi par le réalisateur), sur les représentations du diable et de l’enfer (utilisation minime de l’animation), sur des maquettes même. Une entrée en matière qui peut ennuyer certains mais qui nous plonge directement dans l’univers de la magie et des sorcières. Christensen nous téléporte dans le quotidien des sorcières, préparant philtres et autres potions, rapidement rattrapées par les terribles membres de l’inquisition. Christensen incarne lui-même Satan (!!), apparaissant plusieurs fois dans le récit sous la forme d’un satyre à la langue bien fourchue. Un diable réussi, lubrique, cocasse, bizarre, digne des représentations du Moyen Age. D’ailleurs les effets spéciaux de l’époque sont d’une grande habilité, entre maquillages originaux (démons et autres satyres de l’enfer) et effets visuels ambitieux (démons animés image par image, pièces absorbées par une force étrange, décors majestueux, ballet de sorcières volant au-dessus de la ville endormie…).
Christensen passe et repasse dans les moindres recoins de l’univers de la sorcellerie (absence de chats noirs cependant), et remonte jusqu’à notre époque (à présent le siècle dernier pour nous) en comparant certains cas de femmes accusées de sorcellerie avec des jeunes femmes atteintes plus ou moins d’hystérie, poussées dans des asiles psychiatriques par des médecins bien expéditifs. Même le somnambulisme ou certaines manies fâcheuses (le vol) sont comparés avec des possessions. Ce point de vue singulier permet de découvrir que la psychanalyse était encore à son commencement, les clefs de l’inconscient étant apparemment encore non explorées. D’où l’utilisation de méthodes peu orthodoxes comparées brièvement à celle de l’inquisition, accusant diverses victimes pour des raisons fort déconcertantes.
Christensen signe là un film hors normes, bâtissant sa force par des scènes incroyables, hallucinantes, choquantes, quasi immontrables pour l’époque: sorcières embrassant le cul du diable, bébés cuits au chaudron, jeune femme s’offrant nue à un démon, nonnes déglinguées, hommes d’église sadiques orchestrant chantages et interrogatoires terrifiants, bonne sœur s’enroulant une ceinture cloutée autour de la taille, vieilles dames pissant dans un seau pour ensuite balancer le liquide sur une porte, sabbat aux allures d’orgies…
Christensen va jusqu’à présenter les instruments de tortures de l’époque, provoquant l’effroi le plus total. Une actrice du film ira jusqu’à tester en live "l’écrase doigt"! Christensen nous transporte clairement dans un autre monde par le biais des deux séquences dites imagées: la sorcière découvrant le château merveilleux et inquiétant du diable lui-même ou ce sabbat infernal, long et surréaliste. En prenant Bosch parmi ses inspirations, Christensen signe par ce sabbat une séquence démente et fantasmagorique, rythmée par une musique splendide, et multiplie les images les plus belles et les plus marquantes de son époque.
Christensen inquiète aussi lorsqu’il montre l’une de ses actrices avouer qu’elle a vraiment rencontré le diable ou quand il expose quelques vieilles physiquement bien abîmées.
Ouvrant la voie aux sous-genres dédiés aux sorcières et autres horreurs commises par l’inquisition, "Haxan" n’a absolument rien perdu de sa superbe, et se révèle encore et toujours comme l’un des plus beaux films fantastiques chocs des années 20. - Jérémie MARCHETTI
A PROPOS DE CE QU'IL RESTERA DE NOUS Après Le marin masqué et Un monde sans femme, la belle moisson de moyens-métrages continue cette semaine, avec la sortie en salle d'un film de Vincent Macaigne, grand prix (mérité) au dernier festival de Clermont-Ferrand, Ce qu'il restera de nous. Déjà identifié comme metteur en scène de théâtre (Au moins j'aurai laissé un beau cadavre, sa reprise triomphale d'Hamlet) et comme acteur (avec sa présence lunaire et son air débraillé, dans Un monde sans femme, notamment), Macaigne s'impose désormais aussi, avec brio, comme réalisateur.
Son premier film, qui dure une quarantaine de minutes, est un électrochoc. Ou, pour le dire autrement, une façon de soigner le mal par le mal : les petites mesquineries familiales, la théâtralité, l'hystérie, l'anti-bourgeoisie, tous ces lieux communs dont on a appris à se méfier à force de les voir répétés sous des formes avachies, Macaigne les reprend à la racine, un à un, pour mieux les arracher.
Le film raconte les retrouvailles, chaotiques, de deux frères que tout oppose : l'un, clodo hirsute et éructant du Nietzsche, dormant dans sa Renault 5 cramée au bord d'une rivière (Thibault Lacroix) ; l'autre, jeune cadre dynamique, marié, enchaînant les stages à L'Oréal sans plus d'espoir que celui de payer ses traites à la fin du mois (Anthony Paliotti). Tous deux, ainsi que l'épouse du second (Laure Calamy), se retrouvent aux obsèques du père, qui leur laisse pour héritage un pavillon de banlieue, un petit pactole et beaucoup d'amertume. Et d'eux, alors, que restera-t-il ?
C'est le miracle du film : de ce terreau sinistre, réussir à extraire quelque chose de céleste. Il y a la conviction, ici, que la beauté est nécessairement convulsive, qu'elle est le résultat d'une lutte jamais gagnée par avance (voir le premier gros plan sur le visage Laure Calamy en larme, sublime parce qu'on ne l'attendait plus), mais difficilement contestable. Ainsi, chez Macaigne, même la plus abjecte des situations, même la plus cruelle des répliques ("Je t'aime pas, j'aime pas ta mouille") peut charrier son lot d'amabilité.
Avec un sens de la bouffonnerie qui fait décoller chaque réplique, le jeune cinéaste déplace ses acteurs à travers des cadres extrêmement composés et picturaux – c'est aussi un formidable paysagiste – et les fait parler jusqu'à l'épuisement. Epuisement des mots (comme chez Eustache), épuisement des corps. Ce pourrait être éreintant, c'est au contraire exaltant, tant l'acuité sociale et psychologique se joint ici à un projet formel cohérent, qu'aucun esprit de sérieux ne vient entacher. De ce film, il restera beaucoup.
Jacky Goldberg (les Inrocks)
A PROPOS DE MOHAMED BOUROUISSA Mohamed Bourouissa est un photographe né en 1978 à Blida en Algérie.
Il obtient son DEA en Arts plastiques à l'Université de Paris I - Sorbonne, en 2004. Il est également diplômé de l'École nationale supérieure des arts décoratifs, spécialisation photographie.
Depuis 2002, il est régulièrement invité à participer à des expositions collectives. Son travail fut ainsi présenté au Festival de photographie de Lanzhou (Chine) en 2006. Depuis 2005, il s'inspire du quotidien des références picturales comme Le Caravage, Delacroix, Géricault, qu'il affectionne particulièrement, et photographiques comme Jeff Wall ou Garcia di Lorcia, s'envisagent comme des tableaux d'allégories contemporaines ou de mythes urbains. Il est lauréat du Prix Voies Off 2007, Arles.
CE QU'IL RESTERA DE NOUS => http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=193099.html
GHÉDALIA TAZARTÈS => http://www.myspace.com/labeljardinaufou
=> http://www.myspace.com/tazarteslelievre
FIFIC => http://www.fific.fr