MESA OF THE LOST WOMEN (France) + CREEDENCE CLEARWATER REVIVAL REVIVAL (France)
Rock'n'Roll station is a station where we can do what we want to do...
Prendre ces mots au pied d'la lettre, une fois de plus.
Le feu n'est pas mort.
Hurlants brûlants vrais faux gitans pas mutants les Mesa of the Lost Women (guitare électrifiée et drums électrochocs, l'épilepsie lubrique) r'trouvent l'paradis. Là maintenant. Des tentations certes, et lesquelles! La nuit se peuple. C'est eux qu'elle étreint, qu'elle enlace, qu'elle convoque de son ardeur salopée, succube violente catapultée loin très loin de tout nanar boiteux.
Collision drive over the rainbow.
Le feu n'est pas mort.
Yves Botz : guitare
Christophe Sorro : batterie
Jac Berrocal : Trompette & chant
Extrait de "Passages" in Revue & Corrigée N° 62 (décembre 2004).
BERROCAL OU L'ART DE LA TANGENTE
Interview: Philippe Robert
On le sait peu mais vous êtes un fan de trompettistes comme Louis Armstrong et Bix Beiderbecke, aussi de Charles Trenet et Mozart. Vous avez dit : « J'aime bien le charme en retard. » Qu'est-ce qui vous a donné le goût pour ces choses ?
Beiderbecke, Armstrong, sans oublier Bubber Miley en 1927 chez Ellington et tous les autres... C'est vrai qu'il est des airs qui nous sont lointains, voire étrangement "inaudibles" et qui, à la relecture d'un film, d'une radio ou d'un documentaire, telle mélodie, orchestration, telle voix opèrent. Il est bon pour moi de redécouvrir Lys Gauty, Arletty et les chansons plus que troublantes de Suzy Solidor. Avec Catalogue, nous avions repris "Avoir un bon copain" créé en 1931 par le beau ténébreux Henri Garat. A chaque voyage, j'ai toujours une K7 avec Garat, Chevallier, Trénet, Jacqueline François. Ce qui est vulgaire, c'est de bouder son plaisir mais vous savez comme moi qu'il est de plus en plus difficile d'être "mal pensant" dans cette société. Au risque de faire des jaloux, je me suis procuré il y a peu dans une impeccable pochette années 50 un André Claveau cuvée 42 : « Ah ! c'qu'on s'aimait ». Allez comprendre, il y a trente ans j'aurais trouvé cela affligeant !
Quel a été le "déclic" ?
J'ai été ébloui en voyant l'année de mes huit ans l'orchestre de Fred Adison sous un chapiteau de cirque avec tous ces cuivres éclairés de bleu, puis la grande formation d'Aimé Barelli avec Jerry Mengo sur la terrasse d'un casino, et sur la grande scène du Châtelet, Georges Guétary entouré d'une cinquantaine de girls dans "La Rose de Noël" : du très grand spectacle ! A dix ans, j'ai eu la chance d'être initié aux chants de la Renaissance - j'avais une voix d'alto. C'était magique d'interpréter des maîtres tels Palestrina, Antonio Lotti ou Jachet Van Berchem. Et je me souviens qu'après les concerts des jeunes filles nous offraient des gâteaux. J'ai très vite compris que la scène offrait des possibilités ! En 1963, j'ai dû remplacer au pied levé un chanteur de rock qui s'était fait porter pâle et quelques jours après Ornette Coleman passait à la radio française. Ce qui me hante encore, c'est la photo du grand-père dans cette fanfare de zouaves et ce sous-verre à côté "1914 : Tombé glorieusement au champ d'honneur" escorté de deux décorations : la verte rayée de rouge et la jaune bordée de vert. Je crois que la trompette est venue de là : d'un indiscible cataclysme.
"Cryptea IV" offert en bonus track date de la session de "Musiq Musik", disque de voyage publié par Futura...
... Une nuit d'août 1970, une 2 CV poussive et bariolée s'arrêta au bord d'une piste finlandaise où je bivouaquais : c'était Roger Ferlet, passionné de pop et futur astrophysicien. Quelques heures après, arrivé au bord de l'aurore au cercle polaire, nous décidions de monter le Music Ensemble auquel se joindront aussitôt l'accordéoniste Claude Parle, Dom Coster et le peintre Michel Potage. Grâce au label Futura, "Musiq Musik" vit le jour. C'est effectivement une carte postale sonore avec des tambours de l'an 1000 où se croisent la détresse des réfugiés tibétains rencontrés dans des hôtels miteux du Népal et celle de la Palestine côtoyée au Liban et en Syrie. Pour l'histoire, ce disque tout en reverbération naturelle fut enregistré à quelques mètres de la tombe de l'évêque Pierre de Corbeille qui fut l'instigateur de la Messe des Fous au XIIIe siècle. "Cryptea IV" est un mélange de deux prises tirées des sessions "Musiq Musik" d'octobre 1973. Le prêtre -très sympa - qui prêta l'église romane fut interloqué par cette "musique satanique".
J'imagine qu'avec Gérard Terronès, producteur des disques Futura, vous étiez sur la même longueur d'ondes.
Gérard permit à bon nombre de musiciens de se faire entendre. Futura serait impensable aujourd'hui. Songez, dans un catalogue à dominante free, Gérard produisait des albums de New Orleans, de rock étrange, de jazz bop, du théâtre musical et ce disque atypique, "Musiq Musik", véritable objet brut musical. C'était une époque un peu folle. On pouvait monter un groupe l'après-midi, faire une bande le soir et trouver un label le lendemain. De plus, la presse et les radios s'intéressaient à vous.
Dans les années 70, et même après, vous êtes un des rares en France à produire une espèce d'équivalent parfaitement singulier de la no wave de Mars, Don King et DNA.
C'est vrai que cela pouvait ressembler à une certaine alternative telle qu'elle se pratiquait sur la scène new-yorkaise à la fin des seventies mais nous n'en avions pas conscience. C'est au tout début des années 80 que j'ai eu connaissance de groupes comme Suicide, DNA, Mars, Teenage Jesus and the Jerks, James White Chance, etc. Ma compagne d'alors, qui venait de réaliser un film sur D.A.F., était une amie de Lydia Lunch. J'ai même performé avec Lizzy Mercier Descloux. No wave ? Je ne sais plus puisque lors d'une émission de télé, Fernando Arrabal déclara tout de go : "Berrocal c'est de la musique panique !"
Avec Pierre Bastien, vous introduisez très tôt des éléments hétéroclites et étranges dans votre musique : bicyclette, ophicleïde au mécanisme défectueux. Vous allez jusqu'à enregistrer dans une porcherie !
Avec le Musiq Ensemble, nous utilisions des matériaux a priori "non musicaux" mêlés à des instruments ethniques usagés. Si je fonctionne à l'instinct, Pierre Bastien est un magicien metteur en scène. Ses concerts m'ont toujours surpris. Je regarde, j'écoute, je ne sais d'où cela vient et ça m'enchante. Savez-vous, Pierre en connaît plus que moi sur les trompettistes ! "Post Card" a effectivement été enregistré dans une porcherie, à Jouancy, dans l'Yonne. Le preneur de son était installé au beau milieu de 300 cochons et nous étions, Michel Potage, Roger Ferlet et moi, de chaque côté de l'allée centrale de la porcherie. Aux premiers essais de son, les cochons restèrent silencieux. Il fallut leur donner à manger, lentement, pour obtenir l'effet souhaité. Quant au texte qui est lu, il fut découvert sur une carte postale intacte trouvée dans une poubelle à Paris.
Comment avez-vous rencontré Vince Taylor ?
Chez des amis antiquaires début 70. Lorsque l'idée de "Rock'n'Roll Station" m'est venue, son image s'est immédiatement imposée. On s'est donc retrouvé en 1976, quant à la bicyclette dont le son figure sur l'enregistrement, si singulière soit-elle, j'avoue qu'elle m'échappe toujours. Vince a ajouté au gré de sa fantaisie des expressions à lui sur le texte initial. Avant l'enregistrement, il a dû descendre au café voisin pour retrouver "l'esprit du flipper". Il y eut une seule prise et ce fut la bonne. Juste avant, aux essais, il s'était fait la voix sur une chanson de Billie Holiday qui fut par mégarde effacée. Quel dommage ! A la sortie du disque, c'est le cinéaste Jérôme Boivin qui me parla de la génèse de "Ziggy Stardust and the Spiders from Mars" et de son rapport à Vince Taylor. Après quelques voyages offerts par Bowie afin qu'il se ressource en Angleterre, je l'entends encore me dire "David va devenir une superstar". J'ai été très heureux quand Joe Strummer des Clash s'est procuré "Fatal Encounters", la compilation où figurait "Rock'n'Roll Station" lorsque l'on ne pouvait plus se procurer le LP Davantage.
La scène pour vous, c'est important ? Vous y semblez vulnérable, comme mis en danger dans une sorte de rituel évoquant ceux des Actionnistes viennois ou Iggy Pop avec les Stooges sur "I Wanna Be Your Dog" que vous avez d'ailleurs repris !
Je vais vous dire, je suis sur scène depuis l'âge de dix ans. Je ne sais toujours pas ce qu'il s'y passe. J'ai tout à apprendre. La scène est comme une maîtresse : elle vous attire, vous repousse, vous fait peur mais pour rien au monde vous ne rateriez un rendez-vous.
Vous sentez-vous proche de certains performers qui évoluent dans le champ de ce qu'on appelle Poésie Sonore ? Vous avez été invité à faire une lecture d'Artaud à la Skep Gallery...
... Oui, tout simplement parce que la poètesse Holly Anderson m'avait motivé à me remémorer "La Prière" d'Artaud que je connaissais par Jean Vasca qui l'avait mise en musique. Mais le Festival de Poésie de Paris en 1985 avec Tahar Ben Jeloun, Bernard Heidsieck, Jacques Doyen et Michael Lonsdale fut une belle initiative. Oh, j'ai fait musicien-objet lors d'une fameuse Revue Parlée au Centre Beaubourg. Personne ne croyait à cette soirée autour du "Soleil Noir". La direction attendait tout au plus 200 personnes mais il y eut tellement de monde que les pompiers sont intervenus et repoussèrent le public. C'était en 1981. Il y avait des gens comme Jacques Monory, Orlan, Juliette Gréco, François Di Dio, Gherasim Luca. Une soirée de dingues ! De deux heures de lectures / actions, cela s'est soldé par un communiqué de dix minutes tellement il y eut d'incidents.
Avec le label Davantage, vous avez été un des pionniers en France en matière de prise en charge d'un projet musical par les musiciens eux-mêmes...
Disons qu'avec Davantage nous réalisions des séances qui n'en finissaient pas. Nous avons même travaillé à des albums qui ne sont pas sortis. Nous étions des apôtres de la non-urgence. Nous aimions les enregistrements en situation et les belles photos. Nous avons même été critiqués pour certaines productions jugées luxueuses et c'est très bien.
Votre vie musicale est marquée par les rencontres. Vous avez joué avec Chris Cunningham des Contortions et vous avez aussi enregistré avec James White Chance. Et puis Steve Stapleton de Nurse With Wound, Jonathan Kane des Swans, les portugais Telectu - votre utilisation de la trompette électronique sur "Lisylis" annonce les deux disques que vous enregistrerez avec eux.
Oui. C'est le genre de question très compliquée : "On a cru vous reconnaître Place de la Concorde le 21 janvier 1993 à 10h 22 en compagnie d'un jeune homme portant fleur de lys argent sur velours mauve écoutant le Requiem de Cherubini sous une pluie battante"! Un jour, dans le nord de l'Yonne, Michel Potage s'arrêta devant une maisonnette face à un champ de betteraves : "Tu vois, c'est ici que Claude Debussy composa "La Mer"". Avec Pascal Comelade, j'ai découvert des introuvables de Salvador Dali, une collection de musiques, des mondes jamais vus ailleurs, j'ai bu des verres dans des tavernes insensées. Avec Steve Stappleton j'ai partagé un théâtre bruitiste dans l'ancien studio des Clash. Ce sont les magasins de disques qui m'ont appris par la suite que c'était de la "musique industrielle". Après un hommage au saxophoniste Giuseppi Logan, James Chance se lança sur un standard de Billie Holiday et dans ce studio glacial, les musiciens furent tétanisés à l'écoute de Léo Ferré. Telectu, c'est encore une aventure à destination inconnue dans un palace 1930 avec fougères géantes, mis en espace par le peintre Palolo sous des appliques de Robert Mallet-Stevens. Sans aucun doute, "A Lagardere" est le plus beau disque réalisé ensemble - Don Cherry venait juste de rejoindre les étoiles. Adolescent, ce fut une chance de partager le champagne avec Duke Ellington Salle Pleyel, comme c'est une chance de faire huit rappels avec Messagero Killer Boys dans une salle de Kiev plombée à la vodka. C'est une chance de travailler avec les Bad Boys à de futurs projets de concerts comme c'est une chance de pouvoir se retrouver avec Michel Potage et Façade dans un magnifique théâtre à l'italienne. C'est une chance de pouvoir jouer dans les ruines de Baalbek au Liban avec Urbi Flat entouré de 200 militaires, Kalashnikov en bandoulière, et de deux unités blindées surmontées de canons anti-aériens à l'entrée du Festival : c'est fou le bruit des chenilles des chars la nuit sur l'asphalte !
Finalement Bix Beiderbecke et les Stooges, les musiques improvisées et le punk, ne sont donc pas antinomiques ?
Antinomiques ? Offrez-vous l'écoute du dernier album magistralement rétro de Bryan Ferry et vous aurez la surprise d'entendre un trompettiste avec le son de Bix Beiderbecke !
A PROPOS DE CREEDENCE CLEARWATER REVIVAL REVIVAL Des guitares électriques pour un coup de couteau au pays du Delta bleu. Des fantômes de chansons d'pèquenauds, d'amours perdus et du désir de s'accorder ouverts. Ils dérivent du feedback aux bourdons rythmiques cueillis aux doigts. Irréguliers, toujours.
Fabrice Eglin est membre fictif du Village Green Preservation Society. Joue de la guitare électrique dans quatre duos dont un mort (Howlin’Ghost Proletarians avec Michel Henritzi) .
Creedence Clearwater Revival Revival alias Hodkins & Kid Victrola avec Alexis Morel-Journel, Guitar input Revox (Psychotic reactions & Lightnin’Rag) avec Jérome Noetinger et Rusted Junk avec Benjamin Renard. Fondateur avec B&B.
Renard du label La discothèque fantôme (ladiscothequefantome.free.fr), membre du comité de rédaction du trimestriel Revue & Corrigée et employé du mail-order Metamkine. Alexis Morel-Journel, diamantaire et membre réel de la North Bay Moustache League depuis 1861. Connu des amatrices et amateurs sous le nom de Bearded Taco John Sampedro, il y joue de la guitare ainsi que dans Deborah Kant, un groupe de grunge-wop (Lyon).
Propriétaire de la marque "ATVFF musique et ondes" pour laquelle il réalise des disques, il est également bassiste yéyé sur Hofner artist solid.
Sites Mesa Of The Lost Women ----> http://100m.free.fr/mesa.htm
http://mesablog.canalblog.com
Site Jac Berrocal ----> http://www.myspace.com/jacquesberrocal